Les droits à l'hôpital

Mise à jour : 02/09/2024
Les droits à l'hôpital
Quand on vit avec un trouble psychique et qu'on se trouve hospitalisé, on dispose de droits que l’on peut exercer. A condition de les connaître.

Quand on séjourne en psychiatrie

Lorsque nous sommes hospitalisés en psychiatrie (à l’hôpital, en clinique), nous disposons de droits que nous pouvons faire valoir avant, pendant et après notre séjour. Mais souvent, nous nous posons des questions sur ce que nous avons l’autorisation de faire, sur ce que nous pouvons demander. Nous nous demandons si on peut nous imposer des choses.

Les principes généraux concernant les hospitalisations en psychiatrie sont fixés par la loi. Il est utile d’en être averti car cela nous permet à la fois de comprendre les règles nouvelles qui font notre quotidien à l’hôpital et de reconnaître une situation dans laquelle nos droits ne seraient pas respectés. A noter : si la loi s’applique partout, l’établissement ou l’unité qui nous accueille peut indiquer, dans son règlement intérieur, la manière précise dont ça se passe sur place.

La loi a prévu bien des situations, mais il s’en présente toujours qui sont inédites. Ainsi, il arrive que des patients ou des soignants fassent part d’une préoccupation sur laquelle la loi ne semble pas donner d’indication claire. La question peut alors être discutée de manière collective dans l’unité, ou bien au cas par cas. Cela donne la possibilité de chercher une solution à deux ou à plusieurs.

Parfois, deux principes inscrits dans la loi poursuivent des objectifs qui peuvent paraître contradictoires. C’est le cas, par exemple, avec le hublot qui équipe la porte des chambres dans certains services. Cette partie vitrée permet aux soignants de veiller à ce que la personne ne se mette pas en danger (éviter qu’elle se blesse, par exemple), à assurer sa sécurité – ce qui est une obligation. Mais comment respecter, en même temps, son droit à l’intimité ? C’est par un échange avec la personne et l’analyse de ses besoins particuliers, à ce moment précis, qu’une solution peut être trouvée pour que les deux principes soient respectés au mieux.

Dans cet article, les droits qui valent pour tout séjour en psychiatrie sont abordés en premier. Ensuite, on passe en revue des droits spécifiques que nous pouvons exercer quand nous recevons des soins avec consentement, appelés “soins libres” – ce sont les plus courants. Enfin, on détaille les droits que nous pouvons exercer quand nous recevons des soins sans consentement.

L’information sur les soins

Nous avons le droit d’être tenus informés de notre état de santé, de notre diagnostic, des traitements qui nous sont prescrits, de leurs bénéfices attendus, de leurs risques et leurs éventuels effets indésirables. Nous pouvons également exercer notre droit de ne pas savoir, si nous souhaitons par exemple rester dans l’ignorance du diagnostic qui est posé (sauf dans le cas d’une maladie transmissible).

Lors de notre admission, l’établissement doit nous remettre le livret d’accueil du patient. Ce document indique notamment les conditions de visite des proches fixées par l’établissement, les droits et obligations des patients, les modalités selon lesquelles une réclamation ou une plainte est examinée. Une version vidéo de ce livret est parfois disponible sur la chaîne Youtube de l’établissement.

L’établissement doit aussi nous remettre un résumé de la Charte de la personne hospitalisée. Ce document, qui émane du ministère de la Santé, décrit les droits que la personne peut faire valoir dans n’importe quel établissement de santé. Il précise notamment que “l’information donnée au patient doit être accessible et loyale”, y compris “sur les frais auxquels elle pourrait être exposée au titre de sa prise en charge”.

La confidentialité du séjour

Nous avons le droit de garder pour nous le fait que nous sommes hospitalisés, ou encore les raisons de cette hospitalisation. 

Nous avons le droit de demander la non-divulgation de notre présence dans l’établissement. Cette possibilité figure dans le Code de la santé publique. La personne chargée de l’accueil reçoit alors la consigne de ne pas donner l’information sur notre présence si la question lui est posée par téléphone, ou si un visiteur se présente en demandant à nous voir. Le dispositif est désigné sous le nom de “confidentialité simple”, dans la fiche pratique publiée en 2020 par le Réseau des référents régionaux d’identitovigilance pour les établissements de santé.

Dans certains cas particuliers, nous pouvons demander la “confidentialité renforcée”, ou pseudo-anonymisation. En pratique, cela implique de porter un nom fictif pour la durée de notre séjour. Cela peut se justifier si nous sommes en danger (situation de violence, de maltraitance), si nous exerçons ou si un de nos proches exerce dans l’établissement où nous sommes soignés.

Les vêtements

Nous sommes en droit de porter nos vêtements personnels à l’hôpital, même si ce n’est pas inscrit dans la loi. Dans certaines unités, il est pourtant demandé à la personne de se changer lors de son admission et de mettre le pyjama bleu ou vert fourni par l’établissement. Nous pouvons nous sentir oppressés de porter une tenue uniforme, la même pour tous les patients. Nous pouvons aussi ressentir de l’humiliation parce que notre tenue nous identifie aux yeux de tous comme un patient ou une patiente, et non comme la personne que nous sommes.

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) a émis des recommandations qui concernent les unités fermées, où sont dispensés des soins sans consentement. Il estime que « les personnes privées de liberté ont le droit de porter leurs vêtements personnels. Leurs proches doivent être autorisés à leur en apporter et l’administration doit fournir gratuitement des vêtements aux personnes qui en ont besoin. Une tenue de ville doit être mise à leur disposition pour des occasions particulières, notamment en cas de présentation à l’autorité judiciaire. » (Recommandation 74 du rapport 2020).

Le CGLPL rappelle que « le port obligatoire du pyjama ne peut résulter d’une mesure générale, mais seulement d’une décision médicale, c’est-à-dire prise personnellement par un médecin après examen d’un patient, individualisée et régulièrement révisée » (Rapport 2018, page 41).

Dans son rapport 2022, il souligne : « Le pyjama imposé en permanence à certains patients peut […] s’analyser comme un moyen de contrainte dès lors qu’il a pour vocation à contenir les patients dans les murs et à éviter le risque de fugue ».

Sur cette question du pyjama d’hôpital, on constate une opposition entre d’une part, les règles de fonctionnement de certains services et d’autre part, le respect du consentement de la personne sur un des aspects de sa prise en charge. La Charte de la personne hospitalisée rappelle, par ailleurs, que celle-ci doit être “traitée avec égards”. Si nous sommes préoccupés par notre tenue, il convient d’en parler avec l’équipe de soins pour avoir plus de précisions.

La dignité

Nous avons droit à notre dignité. « La personne malade a droit au respect de sa dignité », indique un article du Code de la santé publique, depuis la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades en général. Un autre article réaffirme ce droit dans le champ spécifique des soins psychiatriques sans consentement, indiquant : « En toutes circonstances, la dignité de la personne hospitalisée doit être respectée […] ». L’accès aux toilettes et à la douche, notamment, doit nous être garanti à tout moment durant notre séjour, y compris en cas de mesure d’isolement ou de contention.

Ce principe est si fondamental qu’il est également énoncé dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme, notamment à son article 1er. Aucune exception ne peut être tolérée et tout abus est puni.

En cas de non-respect de la dignité de la personne hospitalisée, des alertes peuvent être lancées :

  • par la personne elle-même. Elle peut exercer les trois recours cités plus bas (CDU et, pour les soins sans consentement, CDSP et CGLPL).
  • par les professionnels. En effet, « les agents doivent signaler aux autorités hiérarchiques toute atteinte à la dignité ou aux droits fondamentaux des personnes privées de liberté dont elles ont connaissance. Si ce signalement est impossible ou infructueux, ils doivent pouvoir l’effectuer auprès de toute autre autorité compétente et bénéficier d’un régime de protection adapté. » (CGLPL, rapport du 4 juin 2020).

L’intimité

Nous avons droit à notre intimité. Ainsi, le Code de la santé publique précise que « l’infirmier respecte la dignité et l’intimité du patient, de sa famille et de ses proches. »

Il se peut que la porte de notre chambre soit équipée d’un hublot. Ce dispositif est destiné à permettre aux soignants de s’assurer que nous ne nous mettons pas en danger. Mais il est compliqué, dans une telle configuration, que notre intimité soit préservée. Nous pouvons aborder le sujet avec l’équipe soignante, pour qu’elle s’interroge sur la pertinence de cette surveillance constante, au regard du risque lié à notre état de santé. Le hublot pourrait-il être occulté, comme cela a été prévu dans certains établissements ?

Les arguments des uns et des autres devront être entendus, de manière consensuelle, pour trouver une solution satisfaisante. Plusieurs rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), mais aussi de la Haute autorité de santé (HAS) encouragent les lieux de soins à prendre en compte cette problématique, afin de prendre toute mesure de surveillance « dans le respect de la dignité des patients et de leur intimité » (CGLPL, rapport du 4 juin 2020).

Le courrier

Quand nous sommes hospitalisés, nous avons le droit d’envoyer du courrier aux personnes de notre choix et d’en recevoir.

Dans le cas où nous recevons des soins sans consentement, la loi est particulièrement explicite concernant le droit à la correspondance. La personne est libre d’écrire à qui elle veut et le Code de la santé publique nomme même expressément plusieurs types de destinataires : « En tout état de cause, [la personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement] dispose du droit :

  1. De communiquer avec les autorités [que sont le préfet de département ou son représentant, le président du tribunal judiciaire ou son délégué, le procureur de la République] ;
  2. De saisir la CDSP [Commission départementale des soins psychiatriques sans consentement] et, lorsqu’elle est hospitalisée, la CDU [commission des relations avec les usagers] ;
  3. De porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté [CGLPL] des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence ;
  4. De prendre conseil d’un médecin ou d’un avocat de son choix ;
  5. D’émettre ou de recevoir des courriers. »

De son côté, le CGLPL a émis des recommandations pour le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes privées de liberté (4 juin 2020) : “Les personnes privées de liberté doivent être libres d’entretenir une correspondance avec des personnes extérieures, dans la langue de leur choix. Les autorités en charge des lieux de privation de liberté doivent mettre à disposition des personnes privées de liberté tout moyen de tisser ou d’entretenir leurs liens familiaux, amicaux ou sociaux, notamment par les nouvelles technologies.”

De plus, “les personnes privées de liberté doivent être en mesure d’entretenir une correspondance avec les autorités extérieures (autorité judiciaire, élus, CGLPL, Défenseur des droits, comité de prévention de la torture, comité des droits de l’enfant, etc.) ainsi qu’avec leurs conseils par un circuit garantissant sa confidentialité et son bon acheminement. Les modalités d’envoi de ces courriers doivent faire l’objet d’une information explicitée oralement et disponible par écrit, dans une langue et dans des termes qu’elles comprennent. »

L’accès à l’air libre

Nous sommes en droit de sortir à l’air libre, autrement dit d’accéder à un jardin, une cour ou une terrasse durant notre séjour. Cependant, la loi prévoit que des restrictions sont possibles dans le cas de soins sans consentement, à condition que celles-ci soient proportionnées à l’état de santé mentale de la personne, sur décision motivée du psychiatre.

Le CGLPL souligne « la nécessité absolue de permettre aux personnes hospitalisées, quel que soit leur mode d’hospitalisation, d’avoir accès à l’air libre » (rapport 2016).

La cigarette et la vaporette

Nous n’avons pas le droit de fumer des cigarettes dans les locaux de l’hôpital. Selon la loi, il est interdit de fumer dans tous les lieux publics, dont les services de soins.

Cependant, cette interdiction n’est pas applicable dans les chambres des personnes accueillies dans les structures de long séjour, lesquelles sont assimilables à des espaces privatifs. Le règlement intérieur de l’établissement peut malgré tout préciser les modalités d’encadrement, voire d’exclusion de fumer dans les chambres, compte tenu notamment du risque de provoquer un incendie.

En ce qui concerne la vaporette, le cadre légal est moins restrictif que pour la cigarette, compte tenu de l’absence de certitudes sur les méfaits sanitaires du vapotage passif (quand on est exposé à la vapeur des autres). S’il n’est pas formellement interdit par la législation actuelle pour les personnes hospitalisées en psychiatrie, certains règlements intérieurs d’établissement prévoient son interdiction pour des motifs tenant à l’hygiène et à la sécurité.

Si nous désirons arrêter de fumer, nous pouvons demander à être accompagné pour le sevrage durant notre séjour en psychiatrie. L’aide au sevrage tabagique est encouragée par la loi Evin. Toutefois, cette disposition est appliquée à des degrés variables selon l’établissement.

Le vote

Nous avons le droit de voter si nous sommes hospitalisés en psychiatrie, que nous soyons soignés avec ou sans notre consentement. La direction de l’établissement est tenue de faciliter l’exercice de ce droit. Cela peut notamment passer par une autorisation de sortie ou une procuration au moment d’une élection.

Le Code électoral précise : « Des personnes assermentées par un tribunal d’instance peuvent se rendre à domicile, en prison ou encore à l’hôpital pour établir des procurations. Lorsqu’un scrutin est organisé, tout patient hospitalisé peut voter par procuration. »

De son côté, le Code de la santé publique indique : « [Toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement ; quelle que soit la mesure] dispose du droit : […] d’exercer son droit de vote ».

Les particularités dans les soins avec consentement

Avec ou sans consentement, quelles différences

Il existe deux modalités de soins, avec ou sans consentement. Pour comprendre ce qui les distingue et les règles qui s’appliquent à chacune, consulter notre page L’organisation des soins. La partie ci-dessous concerne les droits spécifiques aux soins avec consentement, dits soins “libres”.

La liberté d’aller et venir

Nous avons le droit d’aller et venir dans l’hôpital et de sortir de l’hôpital. Cette liberté de circuler doit être respectée même si notre chambre se trouve dans un service fermé, ce qui peut arriver à certains moments, dans certains établissements.

Le Code de la santé publique indique : « Une personne faisant l’objet de soins psychiatriques avec son consentement pour des troubles mentaux […] dispose des mêmes droits liés à l’exercice des libertés individuelles que ceux qui sont reconnus aux malades soignés pour une autre cause. »

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) a émis des recommandations qui abordent ce point : « Dans les établissements de santé mentale, aucun patient admis sous le régime des soins libres ne peut être privé de sa liberté d’aller et venir, ni empêché de quitter le service. » (4 juin 2020)

Dans certains établissements, la personne hospitalisée en soins libres qui séjourne dans un service fermé est informée dès son arrivée de son droit d’aller et venir librement, à charge pour elle de demander à l’équipe de lui ouvrir la porte quand elle le souhaite. Le séjour dans le service fermé doit être limité dans le temps et motivé, par exemple par une saturation du service ouvert. Dès qu’une chambre s’y libère, la personne doit pouvoir en bénéficier en priorité.

Le téléphone

Nous avons le droit d’utiliser notre téléphone portable. L’équipe soignante peut nous recommander de le lui confier, mais notre consentement est impérativement requis pour cela.

Pour le respect de la vie privée, il est interdit de prendre en photo les autres patients ou le personnel avec un téléphone, ainsi que de les filmer en vidéo. Le faire constitue une infraction.

L’isolement

La mesure d’isolement et de contention est en principe exclue en soins libres.

Toutefois, il demeure possible d’isoler un patient admis en soins libres “pendant quelques heures”. Ce point a été précisé par l’instruction du 29 mars 2022: « Dans […] les établissements autorisés en psychiatrie, il est possible de mettre en place, à titre exceptionnel et en cas d’urgence, pour des raisons tenant à la sécurité du patient ou d’autrui, des mesures de protection pendant quelques heures en attendant soit la résolution de la situation clinique critique, soit l’hospitalisation du patient en soins sans consentement ».

Les particularités dans les soins sans consentement

Des droits malgré le non-consentement

La partie ci-dessous évoque les droits et recours spécifiques au cas de non-consentement aux soins. Les principes suivants s’appliquent à toute personne soignée en psychiatrie sans son consentement :

  • La personne reste un citoyen ou une citoyenne à part entière.
  • Les hospitalisations longues ne doivent pas être la règle.
  • La personne doit être informée notamment sur ses droits et voies de recours, et doit pouvoir présenter ses observations si son état le permet, sur la mesure le concernant.
  • La personne doit être le plus possible associée aux décisions et aux soins la concernant.
  • Le Juge des libertés et de la détention (JLD) contrôle la nécessité et le maintien d’une hospitalisation complète (HC) sans consentement. Il intervient au bout de 12 jours au plus tard et tous les six mois. Le juge peut lever ou maintenir l’HC. Le défaut de décision du juge avant la fin des délais entraîne la mainlevée de la mesure. Il contrôle obligatoirement les mesures d’isolement et de contention réalisées lors d’une hospitalisation sans consentement, lorsqu’elle se prolonge au-delà de seuils que la loi a déterminés (48 heures pour l’isolement et 24 heures pour la contention).

A l’échelle internationale, le principe des soins sans consentement fait l’objet de remises en cause. Ainsi, le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme estime que “le placement forcé en institution viole le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, par lesquelles on entend, respectivement, le non-enfermement physique et la protection contre les atteintes corporelles et psychologiques, ou l’intégrité corporelle et mentale” (Rapport sur la santé mentale et droits de l’homme, 2017).

L’information sur la mesure de soins sans consentement

Nous avons le droit d’être informés que nous sommes hospitalisés suite à une mesure de soins sans consentement, des raisons qui motivent cette mesure et des recours qui existent pour la contester.

Le juge des libertés et de la détention (JLD) peut être saisi à tout moment afin d’ordonner la mainlevée immédiate d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement. Autrement dit, de mettre fin à cette mesure. La saisine peut être faite par :

  • la personne faisant l’objet des soins ;
  • les titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur si la personne est mineure ;
  • la personne chargée d’une mesure de protection juridique relative à la personne faisant l’objet des soins ;
  • son conjoint, son concubin, la personne avec laquelle elle est liée par un pacte civil de solidarité (Pacs) ;
  • la personne qui a formulé la demande de soins ;
  • un parent ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de la personne faisant l’objet des soins ;
  • le procureur de la République.

Le JLD peut également, à tout moment, se saisir d’office, c’est à dire prendre l’initiative d’examiner la pertinence de la mesure. Toute personne intéressée peut porter à sa connaissance les informations qu’elle estime utiles sur la situation d’une personne faisant l’objet d’une telle mesure.

Des restrictions aux libertés proportionnées

Nous avons droit à ce que les restrictions à nos libertés soient “proportionnées” à notre état de santé. Autrement dit, ces restrictions doivent être justifiées par notre état et diminuer quand celui-ci s’améliore. Les soins sans consentement sont, en effet, une forme de privation de liberté. Cette situation exceptionnelle est strictement encadrée par la loi.

Le but de ces restrictions peut être de nous protéger contre nous-mêmes si nous risquons de nous mettre en danger, ou bien de protéger les autres si nous risquons de les mettre en danger. Il peut s’agir de ne pas avoir accès, de manière temporaire, à des espaces communs tels que la salle à manger, la salle de loisirs ou la cour intérieure. La restriction peut porter, aussi, sur l’utilisation d’un objet personnel qui pourrait occasionner des blessures, par exemple un coupe-ongles.  

Le Code de la santé publique stipule : « Lorsqu’une personne atteinte de troubles mentaux fait l’objet de soins psychiatriques [sans consentement] ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis ».

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) indique, dans son Rapport 2016 : « Le CGLPL examine au cours de chacune de ses missions les mesures prises pour que les patients bénéficient, au cours de leur hospitalisation, d’une liberté d’aller et venir aussi complète que l’autorise leur état de santé. En effet, seule la considération des soins à prodiguer aux patients ou des mesures de sécurité qu’impose le comportement individuel de chacun peuvent justifier des restrictions à cette liberté. Ces dernières ne sauraient donc résulter ni de mesures d’organisation, ni de contraintes pratiques, ni de mesures de sécurité générales, systématiques et impersonnelles. En d’autres termes, si l’état clinique d’un patient peut justifier qu’il soit privé de liberté, il ne peut pas servir de prétexte à ce que l’ensemble des patients qui l’entourent le soient aussi. »

Des recours pour le respect des droits

Si nous estimons que nos droits ne sont pas respectés, nous pouvons saisir la commission des usagers (CDU) de l’établissement, ainsi que la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP). Nous pouvons aussi porter les faits à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL). Ces trois recours figurent dans le Code de la santé publique.

Ces instances peuvent être contactées par voie postale. Les coordonnées de la CDU figurent dans le livret d’accueil de l’établissement. On peut aussi les demander au personnel soignant.

Les coordonnées de la CDSP correspondant à notre département figurent dans les livrets d’accueil de certains établissements. Sinon, elles peuvent être obtenues auprès de l’Agence régionale de santé (ARS) de notre région. On trouve le site internet de notre ARS en cliquant sur la carte de France des ARS. Nous pouvons aussi interroger la délégation de l’Unafam de notre département.

Pour saisir le CGLPL, on peut se rendre sur son site où figure son adresse postale ou bien remplir le formulaire de contact.

Le téléphone

L’usage du téléphone portable ne peut être interdit à une personne hospitalisée sans son consentement que sur décision d’un médecin. Celui-ci doit motiver le retrait (par exemple, la personne harcèle sa famille, met en ligne des photos d’autres personnes hospitalisées) et en préciser la durée. Ces informations doivent être notées dans le dossier médical de la personne et lui être communiquées par l’équipe soignante.

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) indique : « Le retrait des téléphones portables des patients hospitalisés ne doit intervenir que pour des raisons cliniques régulièrement réévaluées par un médecin. Il ne doit jamais procéder d’une règle systématique, applicable à l’ensemble de l’unité. » (Rapport 2019)

Dans ses recommandations pour le respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes privées de liberté, le CGLPL précise : « Les téléphones et terminaux informatiques personnels des personnes hospitalisées sous le régime des soins psychiatriques sans consentement ne peuvent leur être retirés que sur la décision d’un médecin. Cette décision doit être individualisée et fondée sur l’état clinique du patient. Elle doit toujours être susceptible de contestation ou de recours. »  (4 juin 2020)

Et le CGLPL d’ajouter, dans son Rapport 2020 : « Les patients doivent pouvoir conserver leur téléphone portable à tout moment. Toute restriction à cette règle doit être justifiée par l’état clinique du patient et limitée dans sa durée. En pareil cas, un accès à un téléphone géré par les soignants doit toujours être possible. »

Les sorties hors de l'hôpital

Lorsque nous sommes hospitalisés sans notre consentement, nous avons le droit de demander une sortie de courte durée hors de l’hôpital, soit pour son bénéfice thérapeutique, soit parce que nous devons effectuer des démarches à l’extérieur de l’établissement.

L’autorisation de sortie de courte durée est accordée par le directeur de l’établissement, après avis favorable d’un psychiatre de cet établissement.

Le Code de la santé publique indique : « Afin de favoriser leur guérison, leur réadaptation ou leur réinsertion sociale ou si des démarches extérieures sont nécessaires, les personnes faisant l’objet de soins psychiatriques [sans consentement] sous la forme d’une hospitalisation complète peuvent bénéficier d’autorisations de sortie de courte durée :

1 – Sous la forme de sorties accompagnées n’excédant pas douze heures.

Les personnes malades sont accompagnées par un ou plusieurs membres du personnel de l’établissement d’accueil, par un membre de leur famille ou par la personne de confiance qu’elles ont désignée […], pendant toute la durée de la sortie ;

2 – Sous la forme de sorties non accompagnées d’une durée maximale de quarante-huit heures.

Les visites des proches

Les visites de ses proches ne peuvent être refusées à la personne hospitalisée que sur avis d’un médecin, au regard de son état de santé.

La personne peut contester la justification de cette restriction et exercer les trois voies de recours citées plus haut.

L’isolement et la contention

L’isolement et la contention sont des pratiques que la loi qualifie « de dernier recours ».  Elles résultent de la décision d’un psychiatre, après évaluation du patient. Ces pratiques ont pour objectif d’assurer la sécurité du patient et d’autrui.

Cette décision a une durée de validité de 12 heures pour l’isolement, de 6 heures pour la contention.

L’isolement est défini par la Haute autorité de santé (HAS) comme le “placement du patient à visée de protection, lors d’une phase critique de sa prise en charge thérapeutique, dans un espace dont il ne peut sortir librement et qui est séparé des autres patients”. On parle le plus souvent de “chambre d’isolement”.

La contention mécanique est définie par la HAS comme “l’utilisation de tous moyens, méthodes, matériels ou vêtements empêchant ou limitant les capacités de mobilisation volontaire de tout ou partie du corps dans un but de sécurité pour un patient dont le comportement présente un risque grave pour son intégrité ou celle d’autrui”. Le plus souvent, les bras et les jambes sont attachés par des sangles.

La loi prévoit des garanties quand la mesure se prolonge au-delà du seuil légal de 48 heures (isolement) et de 24 heures (contention). Le médecin doit informer au moins un membre de la famille du patient (en priorité conjoint, partenaire de pacte civil de solidarité ou de concubinage, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt, dès lors qu’une telle personne est identifiée), dans le respect de la volonté du patient et du secret médical. Le directeur de l’établissement doit informer le juge des libertés et de la détention (JLD) dans le même délai. Ces obligations sont énoncées dans la loi du 14 décembre 2020.

Le “Rapport contention et isolement” du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), publié en 2016, précise : « L’architecture des chambres d’isolement doit garantir des conditions de séjour correctes en termes de superficie, luminosité, accès à l’eau et aux sanitaires, etc. L’aménagement de ces chambres doit être favorable à l’apaisement et permettre de disposer d’une literie de qualité avec la position allongée tête relevée possible ; il doit permettre de s’asseoir et de manger dans des conditions dignes et offrir la possibilité de visualiser une horloge.

Un équipement télévisuel et musical doit pouvoir y être utilisé en toute sécurité. Les dispositifs de vidéosurveillance en chambre d’isolement doivent être proscrits car ils portent atteinte à la dignité et à l’intimité. Ils ne sont, de plus, pas nécessaires si la présence soignante est adaptée à la clinique de la personne. »

Pourtant, dans certains établissements, les personnes en chambre d’isolement ne peuvent pas aller aux toilettes lorsqu’elles en ont besoin. Le CGLPL a porté une attention particulière à ce point, indiquant que « les personnes enfermées doivent à tout moment avoir accès à des toilettes, dans des conditions préservant leur dignité et leur intimité » (Rapport du 4 juin 2020).

A l’échelle internationale, les pratiques d’isolement et de contention font l’objet de remises en cause. Ainsi, le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme écrit que “le traitement forcé et d’autres pratiques préjudiciables, telles que la mise à l’isolement […], l’utilisation de moyens de contention, la médication forcée et la surmédication […], constituent non seulement une forme de violation du droit au consentement libre et éclairé mais aussi une forme de mauvais traitement” (Rapport sur la santé mentale et droits de l’homme, 2017).

L’inscription au fichier Hopsyweb

Si nous recevons des soins sans consentement, notre nom est systématiquement inscrit dans un fichier informatique nommé Hopsyweb.

Pourquoi ce fichier 

Ce fichier a été créé par décret en 2018. Il s’agit d’un outil utilisé par les agences régionales de santé (ARS) pour le suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement. Depuis 2019, un croisement sur les noms est opéré de manière automatique avec un autre fichier, le Fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Cette opération a pour objectif “la prévention de la radicalisation à caractère terroriste”, a indiqué le Conseil d’Etat en 2020.

Dans sa délibération, datée du 14 avril 2022, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) précise que cette comparaison entre les deux fichiers est “réalisée lorsqu’un nouvel individu est enregistré dans l’un des deux [fichiers], lors d’une nouvelle mesure sur un dossier existant pour une personne déjà enregistrée dans Hopsyweb et, en toute hypothèse [de manière systématique], toutes les 24 heures”.

La décision de croiser ces deux fichiers a suscité un tollé général dans le monde de la psychiatrie. Le Cercle de réflexion et de proposition d’actions sur la psychiatrie (CRPA) avait présenté 6 demandes d’annulation du décret devant le Conseil d’Etat, avec le soutien de l’Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques (Unafam) et d’autres organismes représentant notamment des professionnels de santé. Le Conseil d’Etat a rejeté ces demandes en 2020.

Qui a accès aux informations d’Hopsyweb

La loi a établi une liste des personnes qui peuvent être destinataires des informations contenues dans Hopsyweb. Parmi elles, les représentants de l’Etat dans le département où la personne a été hospitalisée (exemple le préfet), le juge des libertés et de la détention, le procureur de la République du tribunal de grande instance, le directeur de l’établissement d’accueil ou l’agent placé sous son autorité, l’avocat de la personne ou encore les membres de la Commission départementale des soins psychiatriques, et le maire de la commune de résidence.

A cette liste initiale, ont été ajoutés en 2022 les préfets d’autres départements que celui où la personne a été hospitalisée, et certains services de renseignements tels que la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

Combien de temps dure l’inscription dans Hopsyweb

Le décret prévoit que les données concernant une personne inscrite dans Hopsyweb sont “conservées pendant trois ans à compter de la fin de l’année civile suivant la levée de la mesure de soins sans consentement”.

Les droits sont aussi... un jeu

Psycom a créé un jeu de société pour celles et ceux qui veulent s’emparer de leurs droits ou lancer la discussion sur le sujet avec les équipes soignantes. Il s’agit d’un kit pédagogique baptisé Histoires de droits.

Cet article a été écrit par Estelle Saget (Psycom), Sophie Arfeuillère (Psycom) et Maud Meylan (chargée de mission à Psycom jusqu’en 2022). 

Ont été sollicités pour cet article : Olivier Dupuy, docteur en droit, enseignant vacataire à l’université de Bordeaux et à l’université de Strasbourg, formateur spécialisé dans le droit des institutions sanitaires, sociales et médico-sociales ; Olivier Jouanno, médiateur de santé-pair au sein du Dispositif Multi-Services Handicap Psychique (DMS-HP) qui dépend de l’association Adapei-Aria de Vendée à La Roche-sur-Yon ; Pauline Tremblay, médiatrice de santé-paire à l’établissement public de santé mentale Cesame, près d’Angers (Maine-et-Loire) ; Juliette Vaillant, médiatrice de santé-paire à l’Établissement public de santé (EPS) Barthélémy Durand à Etampes (Essonne) jusqu’en août 2023.

© Psycom – Tous droits réservés

Sophie Arfeuillère déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.).

Olivier Dupuy exerce comme formateur libéral et intervient à ce titre dans des établissements de santé et du secteur médico-social. 

Olivier Jouanno déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.). Il a participé de 2022 à 2023 à l’évaluation de structures de santé mentale dans le cadre du programme Quality rights, en partenariat avec le Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé (CCOMS), service de l’EPSM Lille Métropole. Il s’est rendu en observateur dans les établissements qui se portent volontaires en France, pour y évaluer la qualité des soins et le respect des droits.
 
Maud Meylan déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.). Elle participe à l’évaluation de structures de santé mentale dans le cadre du programme Quality rights, en partenariat avec le Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé (CCOMS), service de l’EPSM Lille Métropole. Elle se rend en observatrice dans les établissements qui se portent volontaires en France, pour y évaluer la qualité des soins et le respect des droits.

Estelle Saget déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.).

Pauline Tremblay déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.). Elle a participé à l’évaluation de structures de santé mentale dans le cadre du programme Quality rights, en partenariat avec le Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé (CCOMS), service de l’EPSM Lille Métropole.

Juliette Vaillant déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec des entreprises fabriquant ou commercialisant des produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux, matériel médical, e-santé, marketing médical, etc.). Elle exerce depuis août 2023 en libéral comme médiatrice de santé-paire, au titre de formatrice et consultante indépendante. Elle a participé en 2022 à l’évaluation de structures de santé mentale dans le cadre du programme Quality rights, en partenariat avec le Centre collaborateur de l’Organisation mondiale de la santé (CCOMS), service de l’EPSM Lille Métropole.

Ces déclarations peuvent être vérifiées sur la Base Transparence Santé du Ministère de la Santé.