[VU SUR LE WEB] Le suicide de Nicolas, un lycéen de Poissy (Yvelines), le 5 septembre, a provoqué une mobilisation sans précédent face au harcèlement scolaire. Ses parents ont rendu publique le 16 septembre la lettre reçue du rectorat au mois de mai, après qu’ils aient dénoncé l’inaction de l’institution. L’autorité administrative y évoquait la possibilité de poursuites contre eux pour “dénonciation calomnieuse” vis à vis de la communauté éducative. Un plan interministériel de lutte contre le harcèlement scolaire a été présenté le 27 septembre.
- Lire l’essentiel des mesures de ce plan sur France Bleu
“Pourquoi c’est si difficile de lutter contre le harcèlement scolaire ?” La question avait déjà été posée au mois de juin par Eloise Bartoli, journaliste à France Info. Les spécialistes interrogés pointaient notamment une “culture” assimilant ces violences à de simples “chamailleries qui feraient partie de la sociabilisation des élèves”.
La rédaction de TF1 se demande maintenant “comment sortir de l’impuissance“. Les journalistes Caroline Bayle et Sylvie Pinatel soulignent l’intérêt mais aussi les limites des dispositifs mis en place par l’Education nationale, comme le plan de prévention Phare.
- Regarder le reportage du 17 septembre sur TF1
Alors quels leviers actionner ? On peut agir dans les établissements en renforçant la présence de personnel qualifié. “La réponse consiste à redéployer des postes d’infirmières et d’infirmiers scolaires, de médecins comme de psychologues scolaires”, estime Martine Brousse, présidente de l’association La Voix de l’enfant.
- Lire son entretien, par Marion Rousset, sur Télérama
- Ecouter Sandie Cariat, infirmière scolaire dans l’Hérault, dans l’émission Le téléphone sonne, sur France Inter
Des “cours d’empathie” sont actuellement testés en France dans plusieurs classes de maternelle. L’expérience, qui a débuté en septembre 2022, s’inspire du programme “Libéré du harcèlement” en place au Danemark. Le dispositif est en cours d’évaluation par un chercheur en psychologie de l’Université Paris 8.
On peut agir par la régulation des réseaux sociaux. Les parents d’une adolescente qui s’est suicidée dans un contexte de harcèlement scolaire ont déposé plainte le 8 septembre contre TikTok, pour “provocation au suicide”, une première en France. En effet, les algorithmes de ces plateformes peuvent renforcer le mal-être des jeunes, en leur proposant toujours plus de contenus sur leur sujet de préoccupation – pour la jeune fille, son poids.
Des associations dédiées aux jeunes proposent de tirer parti de la directive européenne sur le numérique, le Digital service act, transposée dans le droit français. “Les plateformes sont désormais dans l’obligation d’expliquer le fonctionnement de leurs systèmes de recommandation, écrit la journaliste du Figaro Eugénie Boilait. La prévention pourrait ainsi être beaucoup plus efficace”.
- En savoir plus sur cette piste dans l’article du Figaro
On peut agir en trouvant, avec l’enfant harcelé, de nouveaux moyens pour se défendre. La thérapeute Emmanuelle Piquet, spécialiste de la thérapie brève et stratégique selon l’école de Palo Alto, a développé une approche consistant à observer, à travers le récit de l’enfant, comment se déroulent les attaques et à “élaborer avec lui une stratégie de riposte, de résistance qui va rendre la position du harceleur inconfortable“.
- Ecouter les enfants d’une école primaire de région parisienne et les commentaires d’Emmanuelle Piquet dans l’émission France Info Junior
De son côté, la psychologue Catherine Verdier souligne sur BFM TV que “les parents seuls ne peuvent pas résoudre la situation”. Et d’ajouter : “Il ne faut rien faire sans le consentement de l’enfant”. Une piste consiste à encourager l’enfant à s’investir dans des activités extra-scolaires. Il peut y faire l’expérience positive d’une situation “où les autres ne lui font pas peur”.
- Lire l’article de Juliette Brossault sur BFM TV
La justice peut-elle être un recours ? Le 18 septembre, le père d’une lycéenne transgenre a déposé une main courante au commissariat d’Alfortville (Val-de-Marne). Le lendemain, un collégien a été interpellé en classe par les policiers. La jeune fille avait reçu de sa part des menaces de mort, via Instagram. Le collégien a été notifié d’une mesure éducative définie par le parquet comme « une activité au profit de la collectivité » qui devra être effectuée dans les prochaines semaines.
De son côté, l’équipe du Programme Papageno appelle les médias à la vigilance quant au risque de contagion suicidaire. La multiplication des articles autour du suicide de jeunes dans un contexte de harcèlement “génère un sentiment de fatalité”, souligne l’organisme de prévention du suicide. Il recommande de publier aussi des témoignages de rétablissement après un vécu de harcèlement.
- Lire les recommandations sur le site de Papageno