[VU SUR LE WEB] On peut être une championne ou un champion, battre des records, marquer des buts, remporter des médailles et en même temps, rencontrer des problèmes de santé mentale. En parlant ouvertement de leurs difficultés psychiques, des sportifs de disciplines et de nationalités variées contribuent à rompre le tabou. Et à modifier les pratiques, comme le montrent les mesures préventives annoncées le 16 mars par les organisateurs du tournoi de tennis de Roland-Garros.
L’ancien joueur de football Thierry Henry, aujourd’hui consultant pour les médias, a confié avoir cessé de cacher ses émotions. Auparavant, “pleurer, c’était impossible. Tu ne pouvais pas montrer tes faiblesses, affirme-t-il dans l’entretien publié le 7 mars par le quotidien L’Equipe (réservé aux abonnés). C’était : ”Thierry, ne pleure pas, ne pleure pas, ne pleure pas !” Cela m’est arrivé de pleurer, seul, mais je luttais pour ne pas craquer. Maintenant, je pleure.»
- Lire un extrait de l’interview de Thierry Henry sur Le Figaro
Après le suicide du joueur de rugby Jordan Michallet, sa femme Noélie Michallet a encouragé les joueurs à parler en cas de dépression. Elle suppose que son mari a pu ressentir de la honte par rapport à son état. “Pour lui, c’était impensable d’avoir ne serait-ce que quelques jours de repos. Ça le rendait malade d’être affaibli, fatigué. Pour lui, c’était impensable de devoir abandonner ses coéquipiers, son équipe (…) Malheureusement, un joueur a toujours honte d’avouer ses faiblesses, de dire qu’il va mal ou qu’il est fatigué. Je pense qu’il a eu peur du jugement. “
- Lire les propos de Noélie Michallet dans l’émission Canal Rugby Club du 6 mars, repris sur Le Parisien
La championne de tennis Naomi Osaka, qui a déjà témoigné à plusieurs reprises sur ses périodes de mal-être, s’est exprimée à nouveau sur sa santé mentale à la fin de son match à l’US Open, le 12 mars. Lors du premier set, la joueuse japonaise a été insultée par une spectatrice. Celle-ci a crié “Naomi tu es nulle”, provoquant les larmes de la joueuse. A la fin du match, Naomi Osaka a pris la parole pour expliquer sa réaction et décrire ce qu’elle avait ressenti.
Les organisateurs du tournoi de tennis de Roland-Garros, qui s’ouvrira dans deux mois, viennent d’annoncer des mesures destinées à préserver la santé mentale des participants à la compétition. Il est prévu de créer des espaces réservés aux joueurs et à leurs proches, avec restauration, pour qu’ils puissent avoir des moments de répit. Une ligne d’assistance psychologique par téléphone doit leur être proposée, tandis qu’une équipe de spécialistes du soutien psychologique, sur place, pourra être sollicitée.
Enfin, les Jeux Olympiques et paralympiques de cet hiver ont fourni l’occasion à la chercheuse britannique Lisa O’halloran de recenser les études scientifiques portant sur la santé mentale des athlètes après cet événement majeur dans leur carrière sportive. On découvre ainsi que les participants ayant échoué à monter sur le podium ne sont pas les seuls à pouvoir connaître la dépression. Des médaillés sont aussi concernés.
Ces expériences, vécues par des individus vus comme des modèles en termes de performance et de dépassement de soi, viennent contrer l’idée reçue selon laquelle les personnes dépressives sont des gens faibles qui manquent de volonté. Les récits de ces athlètes participent aussi, plus généralement, à diminuer la stigmatisation des personnes vivant avec des troubles psychiques.