[VU SUR LE WEB] Dans les semaines qui suivent la naissance d’un enfant, les deux parents sont susceptibles de développer une dépression. Une étude publiée le 4 janvier dans la revue scientifique de référence The Lancet Public Health montre que, pour les pères, il y a moins de cas chez ceux qui ont bénéficié d’un congé paternité de 2 semaines. Ainsi, le congé paternité pourrait être une des clés pour prévenir ce trouble psychique qui touche un père sur dix.
Les chercheurs de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ont étudié le vécu de 10 000 couples ayant eu un enfant en 2011. 4,5 % des pères ayant pris un congé paternité et 4,8 % de ceux ayant l’intention de l’utiliser présentaient une dépression post-partum, contre 5,7 % de ceux ne l’ayant pas utilisé. En France, le congé paternité, également appelé congé second parent, existe depuis 2002.
Jusqu’ici, la dépression post-partum avait surtout été étudiée chez les mères – près de 2 sur 10 sont concernées. “Ce qu’apporte cette étude, c’est un regard un peu plus élargi sur les facteurs qui peuvent entrer en jeu [dans la santé mentale des parents après la naissance], a expliqué l’autrice principale, l’épidémiologiste Maria Melchior, sur France Culture. Il faut s’intéresser aux pères, et pas seulement aux mères. Et a priori, les politiques de congé paternité telles qu’elles sont mises en place en France sont favorables“.
Le congé paternité, qui durait deux semaines au moment de l’étude, a été porté à 28 jours en 2021. “Une prochaine étape sera de voir si cet allongement offre des avantages encore plus importants en terme de santé mentale des parents”, a souligné la chercheuse sur France Culture. Récemment, de nombreux médias ont interrogé des pères sur leur expérience du congé paternité.
- Lire les témoignages publiés en décembre 2022 sur Marie-Claire
- Et d’autres, en septembre 2022, sur Les Echos
Le congé paternité est moins utilisé en France que dans d’autres pays occidentaux comme le Luxembourg ou les Pays-Bas. Selon les données de l’OCDE pour 2021 (ou dernière année disponible), il est pris par 1 père sur 2. .
- Voir comment se classe la France sur l’infographie publiée le 5 janvier par 20 Minutes
Fait rare à ce niveau de responsabilité, le ministre finlandais de la Défense a annoncé qu’il serait absent de ses fonctions du 6 janvier 2023 à début février pour s’occuper de son deuxième enfant. “Les enfants sont encore petits, et je veux m’en souvenir autrement que sur des photos”, a-t-il écrit sur son compte Twitter.
La réflexion autour de la dépression post-partum des parents est menée par les chercheurs mais également par Collectif interassociatif autour de la naissance (Ciane). Ce collectif, représentant les parents et futurs parents, a réalisé l’an dernier une enquête auprès de 8500 mères. Il a rédigé ensuite des préconisations pour améliorer leur bien-être. Parmi celles-ci : “encourager les partenaires à prendre leurs congés et à le faire dans les premières semaines après la naissance” et “sensibiliser les entreprises à cette question pour lever les freins à la prise des congés de paternité”.
- Lire les propositions sur le site du Ciane
Ainsi, les facteurs protecteurs contre la dépression post-partum, tant maternelle que paternelle, commencent à être mieux connus. “Une position socioéconomique défavorable est associée à une probabilité accrue de dépression postpartum”, note l’épidémiologiste Aurélie Nakamura. La chercheuse a soutenu en 2020 une thèse montrant “le rôle du soutien social pendant la grossesse dans les inégalités sociales vis-à-vis de la dépression postpartum parentale”, que celui-ci provienne de la famille, des amis ou des professionnels de santé.
- Accéder à la thèse en épidémiologie sociale d’Aurélie Nakamura